Une nouvelle constitution, une manifestation dans une ville frontalière et une impasse virtuelle au commerce entre le Népal et l’Inde privent le Népal d’un approvisionnement en aliments, en fournitures médicales et en carburant qu’il puisait traditionnellement chez son voisin.
Tout cela a commencé à Birgunj. Cette ville frontalière népalaise abrite le plus important bureau de douane du pays sur le plan des revenus. Elle contrôle près des deux tiers du commerce du Népal avec l’Inde, son principal partenaire commercial. C’est également dans cette ville que les manifestations ont commencé à la suite de l’adoption d’une nouvelle constitution en septembre 2015. Le poste frontalier y est bloqué depuis le 24 septembre par les manifestants de la communauté madhesi. La minorité ethnique a affirmé que la nouvelle constitution était biaisée à son égard et elle a revendiqué une représentation proportionnelle. Le Népal a cependant affirmé que l’Inde attise les manifestants et fait porter le blâme du blocage frontalier sur son voisin du Sud. En raison des tensions à Birgunj, le Népal est privé des approvisionnements essentiels dont il a besoin.
« Le poste frontalier de Birgunj est bloqué par des manifestants »
Le blocage survient alors que le Népal cherche à se relever des répercussions du tremblement de terre
Les protestations surviennent à un mauvais moment pour le Népal qui se relève toujours du tremblement de terre d’avril dernier. Les aliments, les fournitures médicales et le carburant, qui sont nécessaires aux efforts de redressement, ne peuvent plus entrer au pays en raison du blocage de la frontière. La Nepal Rastra Bank a affirmé que depuis le début du blocage, les exportations sont en baisse de 25,4 %, tandis que les importations ont reculé de 31,9 %, a rapporté le Journal of Commerce (JOC).
Au Népal, le prix des aliments et d’autres articles a monté en flèche alors que le carburant est rationalisé. En octobre, Shova Lama, propriétaire d’un restaurant, a confié à The Wall Street Journal qu’elle était forcée de fermer son entreprise puisqu’elle ne pouvait se procurer le gaz dont elle a besoin pour maintenir son restaurant ouvert.
« La survie quotidienne de ma famille est devenue très difficile maintenant », a-t-elle expliqué à la publication.
Le Népal se tourne vers la Chine pour obtenir de l’aide
Entre-temps, puisque les protestations continuent de paralyser Birgunj, le Népal s’est tourné vers son seul autre voisin, la Chine. En octobre, le pays a signé une entente relative au carburant avec Beijing dans l’espoir de garantir une partie des approvisionnements dont elle a besoin, a rapporté The Wall Street Journal. L’opération a été effectuée par les sociétés pétrolières d’État de chaque pays. La Nepal Oil Corp. et la China National United Oil Corp. ont signé l’entente d’approvisionnement en pétrole en octobre, une première du genre pour ces pays voisins.
L’entente n’était que l’un des nombreux événements qui ont renforcé les liens entre la Chine et le Népal. En 2014, le voisin du Nord a pris la relève de New Delhi à titre d’investisseur étranger direct le plus important au Népal, rapporte le South China Morning Post. Maintenant, le vice-premier ministre du Népal, Kamal Thapa, doit choisir entre la Chine ou l’Inde pour sa première visite officielle de 2016. Le premier choix traditionnel des premiers ministres népalais a toujours été l’Inde. La décision de briser cette tradition et de se diriger vers le nord pour la première mission diplomatique de 2016 pourrait confirmer davantage les relations entre le Népal et la Chine.
La Chine s’est proposée pour aider le Népal en lui offrant du carburant.
À mesure que l’attitude anti-indienne prend de l’ampleur au Népal et que le gouvernement du pays semble vouloir raffermir les relations avec la Chine, le Nepali Times a rapporté que les représentants des manifestants se rapprochent d’une entente avec les autorités népalaises. La communauté madhesi a développé un ordre du jour en 11 points que les représentants des manifestants ont discuté avec les trois partis politiques les plus importants du pays. Si le gouvernement a accepté d’apporter des modifications constitutionnelles afin de donner à la minorité ethnique le droit de conserver des circonscriptions électorales régionales en décembre, les représentants madhesis ne jugent pas l’offre sincère et poursuivent les protestations.
Il semble qu’un règlement pourrait bientôt aboutir, ce qui permettrait la réouverture de la frontière à Birgunj. Cela permettrait au Népal d’accueillir les aliments, les fournitures médicales et le carburant qui lui ont tant manqué durant cette confrontation qui a pratiquement laissé le pays dans une impasse. Il reste toutefois à voir si le pays reviendra vers l’Inde ou s’il conservera un pied en Chine. Le ressentiment contre l’Inde s’est amplifié tout au long du blocage de la frontière et la Chine s’est révélé un voisin compatissant dans l’offre d’approvisionnements depuis le tremblement de terre d’avril.